L’Organisation syndicale des TravailleurSEs du Sexe (OTraS) est née en 2018 en Espagne, de la nécessité de garanties sociales, judiciaires et politiques d’un large groupe de personnes impliquées dans un changement social profond et nécessaire, qui découle, entre autres choses, du moment de bouleversement idéologique mondial avec d’une part la montée de la droite radicale, et les féminismes d’autre part.
Nous sommes, avant tout, des professionnelLEs du secteur économique du sexe et nous contribuons au bénéfice comptable du pays. Deuxièmement, mais pas moins important, nous sommes des personnes avec des diversités idéologiques et sexuelles inscrites dans un féminisme intersectionnel et anticapitaliste.
Troisièmement, nous sommes également divers.e.s par les formes de Travail du Sexe (TdS) que nous représentons en tant que collectif : TdS de rue, TdS en ligne/téléphone, TdS indépendant, TdS de tiers, TdS en intérieur, TdS en extérieur et TdS audiovisuel.
Chacune des modalités de TdS a des besoins particuliers et s’implique en établissant des lignes d’action indépendantes au sein et en dehors du collectif. De même, les diversités individuelles des TdS se traduisent par des besoins spécifiques en termes d’organisation domestique, de rémunération, de couverture sociale, éducative et sanitaire.
Nous sommes pour l’abolition de toute forme d’exploitation, et nous sommes pro-droits : nous revendiquons les droits qui nous sont légitimes de par notre place de travailleurSEs dans la structure de cette société de marché, et nous soutenons une intervention dans la superstructure (symbolique) qui déconstruit l’organisation sociale et domestique hétéronormative, binaire et androcentrique, afin d’inclure et de normaliser les multiples diversités sexuelles et affectives.
Nous nous trouvons en marge de la normativité, mais pas des normes : cela a conduit beaucoup d’entre nous à un état de précarité, accentué et criminalisé par la structure-même de la société patriarcale et capitaliste. Ainsi, dans nos conditions de diversités, mais aussi de précaires (symboliquement et/ou matériellement), nous pouvons affirmer que nous recueillons dans notre féminisme et dans notre discours des personnes transsexuelles, intersexes, queer, homo-, bi- et pansexuelles, raciséEs ; qui sont principalement des femmes, mais parmi lesquelles nous incluons aussi des hommes qui exercent le TdS.
Nous proposons l’avènement des droits individuels et collectifs, matériels et symboliques, pour toutes les personnes qui convergent ici à travers les droits qui doivent nous être garantis en tant que professionnelLEs d’un secteur économique.
Nos valeurs sont claires :
- Horizontalité : nous travaillons en équipe. Nous avons des porte-paroles et des représentantEs par zones et domaines de travail, ainsi qu’en termes bureaucratiques et juridiques. Et nous formons un réseau de soutien avec les participantEs du syndicat.
- Transparence : avec le discours, les ressources et les personnes impliquées dans le syndicat. Tant dans notre dialogue public que dans nos espaces virtuels, nous sommes clairEs et tranparentEs sur le travail que nous accomplissons, les actions que nous menons et l’origine des ressources économiques avec lesquels on compte.
- Antiracisme : la prostitution et le TdS sont consubstanciels à la migration. Nous sommes conscientEs de cette caractéristique et nous ne l’éludons pas. Nous défendons les droits des personnes indépendamment de leur race [sociale] ou de leur ethnie, mais nous ne la supprimons pas, nous la réaffirmons. Le féminisme a de nombreux visages et les besoins spécifiques des groupes racialisés sont l’une des raisons de notre lutte.
- Respect des droits humains : Individuels et Collectifs.
- Apprentissage et formation constants (et universels) : nous sommes des professionnelLEs qualitativement et techniquement forméEs aux arts érotiques ; au traitement impeccable des utilisateurs de nos services, à la couverture des différents besoins affectivo-sexuels qu’ils peuvent demander. De cette façon, nous sommes également en formation permanente sur le plan syndical, et nous plaidons pour une éducation universelle : un pilier fondamental pour empouvoirer ou renforcer celleux qui sont vulnérables à l’injustice.
Nous savons qu’il n’est pas de notre ressort de lutter contre le trafic d’êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle, car c’est un combat qui appartient aux lois sur les étrangers et à la FCSE [corps et forces armées de l’État], mais nous assurons notre proposition comme point d’appui pour l’approche du marché noir dans lequel le phénomène (du trafic) a lieu, et nous nous engageons à dénoncer chaque fois que possible les cas d’exploitation dont nous pouvons avoir connaissance.
En accord avec des organisations telles qu’Amnesty International, nous demandons également la dépénalisation totale de l’activité de TdS, car c’est l’une des décisions qui permettra de localiser plus facilement la traite et le proxénétisme en vue de poursuites et de réparations.
Nous rejetons toute forme d’”industrie du sauvetage” qui instrumentalise les victimes d’exploitation au profit de l’industrie elle-même : judiciariser la traite et la réparation des ses victimes est un engagement que doivent prendre les responsables politiques du monde entier.
Sur notre travail (TdS) nous établissons que :
- Il s’agit d’un échange consenti de services sexuels entre adultes.
- Il est exercé par des personnes de tous les genres (féminin, masculin et non-binaire).
- Les droits légitimes sont les mêmes que ceux qui appartiennent aux travailleurSEs de n’importe quel secteur de la population active (avec des particularités découlant des pratiques et des corps).
- À ces droits s’ajoutent la nécessité d’examens de santé périodiques gratuits, ainsi que le devoir de compléter une formation affectivo-sexuelle cohérente avec un développement sain de l’activité.
- Il est essentiel de reconnaître la relation contractuelle de la personne exerçant le TdS avec 2 sujets qui sont reliés : d’une part la/le client/e, d’autre part l’employeu/r/se s’il y en avait.
Ainsi, pour ce qui concerne notre situation sociopolitique spécifique, nous exigeons :
- La prise de conscience sociale sur la Stigmatisation qui traverse la vie des travailleurSEs du sexe ; c’est-à-dire connaître son implication en tant que “mandat social d’isolement” dans tous les domaines liés au développement personnel : logement, culture, travail, maternité, études et divers processus bureaucratiques.
- Responsabilité politique à l’égard des travailleurs du sexe : cela implique, entre autres, un traitement rigoureux, éthique et correct des données lors des campagnes de sensibilisation à la traite à des fins d’exploitation sexuelle.
- La décriminalisation du travail du sexe sous toutes ses formes, sur la base de lois qui plaident nos droits du travail et nos droits humains.
- La reconnaissance des travailleurSEs du sexe en tant que professionnelLEs du secteur du travail du sexe et des sexualités, avec une agentivité [plusieurs formes de capacités d’agir, décider et peser].
- Dotation d’outils pour être légitiméEs en tant que sujet politique.
Dans la pratique, la plupart des États membres de l’UE ont un domaine de la prostitution plus ou moins régulé, combinant une législation punitive (envers les client/e/s et/ou les travailleurSEs) et une pratique régulatrice. En tenant compte des contextes dans lesquels nous développons le travail du sexe, des qualités du travail du sexe et de la diversité inhérente à l’activité (ainsi que de l’impossibilité de l’éradiquer véritablement), nous proposons un modèle de professionnalisation du travail du sexe qui se rapporte aux spécificités de la profession.
Nous recommandons, de l’initiative de notre main, une augmentation des ressources allouées à l’éducation sexuelle et sociale, qui assimile les travailleurSEs du sexe aux débats et aux causeries en tant que sujets actifs ayant des droits à part entière et une capacité de décision, puisqu’iels sont les porteurSEs des connaissances techniques sur la sexualité, et peuvent alimenter l’éducation précaire aux valeurs de cet état.
Texte original : http://sindicatootras.org/files/La-Organizacion-sindical-de-Trabajadorxs-Sexuales-nace-en-2018-en-Espana.pdf
Site web : https://www.sindicatootras.org
Email : otras@sindicatootras.org
Twitter : @OtrasSindicato
Instagram : otrassindicato
Facebook : Sindicato-OTRAS-249251885803170 tel : (+34) 625 54 90 34