De la manifestation noire à l’insurrection — Lorenzo Kom’boa Ervin

Une perspective autonome et anti-autoritaire

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3 min readJan 25, 2023
Trois manifestants lors des émeutes à Kenosha (Wisconsin) après le meurtre de Jacob Blake, 2020, AFP

Première publication le 24 juillet 2013 par la Black Autonomy Federation.

Nous approchons du 50e anniversaire de la Marche sur Washington de 1963, et certaines choses ont un rapport direct avec le moment présent [le mouvement Black Lives Matter de 2013]. Il faut savoir qu’à l’époque, le mouvement des droits civiques se composait de deux ailes, celle issue du boycott des bus de Montgomery (1955–57), qui a fait du Dr Martin Luther King, Jr. un leader national, et sa Southern Christian Leadership Conference [SCLC]. Dans les années 1960–1963, le Student Nonviolent Coordinating Committee [SNCC], basé sur la jeunesse, avait pris l’initiative au début du mouvement, au détriment de King et du SCLC, et c’est lui qui avait appelé et organisé la Marche sur Washington de 1963.

Iels envisageaient un mouvement de protestation antigouvernemental beaucoup plus militant, qui visait une occupation à long terme et à perturber la ville de Washington, D.C. pour accuser le gouvernement fédéral de protéger le Sud raciste, et de maintenir la pauvreté et l’oppression. Iels prévoyaient même de descendre sur les pistes des aéroports et d’empêcher les avions d’y atterrir, d’arrêter les trains et de bloquer les autoroutes et autres voies de circulation.

Malcolm X a parlé en termes élogieux des plans de manifestation originaux, il en parlait comme d’une avancée par rapport au pacifisme du Dr M.L. King. Cependant, l’administration Kennedy a réussi à manœuvrer et à subvertir la direction autonome, en installant l’ancienne direction des droits civiques, qui était plus conservatrice et disposée à recevoir des ordres directement du gouvernement. Ils avaient été achetés par des entreprises et des subventions gouvernementales et ils ont tué tout militantisme de l’événement. En fait, ils l’ont fait passer d’une manifestation à une “célébration” de la collusion entre l’administration Kennedy et ces dirigeants vendus, en revendiquant “la victoire maintenant”.

Cela nous dit donc ce qui se passe maintenant avec le mouvement de protestation Trayvon Martin, il a été usurpé par Al Sharpton et des éléments plus conservateurs. Celleux qui veulent bloquer le système et protester dans les rues sont usurpés par les éléments modérés et conservateurs qui mettent l’accent sur la “paix”, le “calme” et le “respect de la loi”. Ils disent que “nous devrions attendre qu’Obama” se décide à poursuivre ou non Zimmerman, le meurtrier de Trayvon. Écoutes, tous les jours, les fédéraux poursuivent des affaires qui ont commencé dans des tribunaux d’État ; ils le font certainement dans des affaires de drogue contre de jeunes hommes et adolescents noirs. S’il veut le faire, cela ne devrait pas être quelque chose d’extraordinaire, mais il a peur des fascistes de droite, et ses patrons d’entreprise ne lui ont pas encore donné le feu vert. Il doit rester à sa place et faire ce que Wall Street lui dit de faire.

C’est pourquoi, quelle que soit la manifestation de cette période, elle doit nous conduire à l’insurrection, à la résistance à long terme, connue internationalement sous le nom d’”Intifada”. Elle doit maintenir le militantisme de la protestation d’aujourd’hui en tant que stade de la lutte, mais s’intensifier, se transformer d’abord en un mois de résistance, puis en de nombreux mois, voire des années de résistance, en nous faisant comprendre à chaque étape que nous combattons en fait le gouvernement lui-même (et ses maîtres corporatifs), qui a sanctionné la suprématie blanche, la terreur policière et la violence des justiciers comme certains de leurs outils de contre-insurrection.

Nous combattons le fascisme et ne devons pas être neutralisés ou trompés, comme nous l’a dit Huey P. Newton, cofondateur du Black Panther Party, il y a 59 ans. Ils veulent tuer le surplus de travail des Noirs, les sans-abri, et tous ces éléments qu’ils considèrent comme de la vermine sociale dans leur État policier corporatif émergent. La mort de Trayvon Martin, et de tous ces jeunes Noirs/POC sans nom, doit être unie dans l’esprit des gens, car ils exposent l’attaque de l’empire contre les pauvres et les travailleurs à faible revenu.

Nous devons avoir la maturité de construire un Front uni contre le racisme et la violence policière dans cette période, dirigé par les pauvres, les Noir.e.s/POC, les chômeur.euse.s et les travailleur.euse.s à faibles revenus.

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